vendredi, 05 avril 2019 04:47

Ces généralistes militants qui méritent d’être connus par leur pratique, leur militantisme ou leurs écrits.

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Source : https://www.jle.com
Extrait du Volume 14, numéro 9, Novembre 2018

Avertissement
Espérant leur faire découvrir des écrits et des activités qu’ils ne connaîtraient pas déjà, les collègues sont priés d’excuser de nombreuses omissions, incluant celle de ces médecins spécialistes qui eux aussi valorisent les soins primaires. Les exemples cités ont été glanés au fil de ma veille documentaire de la scène médico-pharmaceutique où les idéologies, le pouvoir, l’argent ou la facilité antagonisent la rationalité et l’humanisme dont les malades ont besoin. Les réalisations présentées sont limitées aux plus représentatives. Bien sûr il faudrait ajouter ceux qui publient dans les bulletins thérapeutiques, luttent contre la publicité trompeuse, animent des formations indépendantes, promeuvent la protection contre l’iatrogénie, encouragent la « déprescription », sont médecins « de rue » ou « sans frontières », dénoncent la privatisation des soins, touchent aux médecines alternatives utiles ou critiquent les dérapages d’une pensée dominante alimentée par des meneurs d’opinion en conflits d’intérêts. 

– Gilles Bardelay. Avec son épouse pharmacienne Danielle, il s’associe en 1981 à l’Union Nationale de Formation Médicale Continue (UNAFORMEC) pour obtenir un financement du Ministère de la santé français permettant le lancement de la revue Prescrire, imaginée peu auparavant par Pierre Ageorges, son premier rédacteur en chef par ailleurs médecin de famille à Neuville aux Bois, dans la région d’Orléans et pleinement engagé dans le développement de la formation médicale continue. Il en deviendra par la suite le seul leader.

Chef de file de « l’International Society of Drug Bulletins », « Prescrire », financée par ses seuls abonnés après un soutien de l’état et du régime général de la sécurité sociale jusqu’en 1993, est vouée à une formation continue militante et indépendante, surtout des généralistes et des pharmaciens, ainsi qu’à l’évaluation rigoureuse des nouveautés. La revue n’a pas d’équivalent, même en anglais, pour l’étendue de la couverture des situations diagnostiques, thérapeutiques, pédagogiques et éthiques rencontrées en médecine générale et en pharmacothérapie ; sa liste noire des médicaments est particulièrement prisée à l’international. Après plus de deux décennies à sa tête, Bardelay se retire à Francheval en Ardennes où le couple promeut le théâtre local. À Paris, Bruno Toussaint est maintenant directeur éditorial ; Christophe Kopp fait de même pour la version anglaise « Prescrire International », en plus de soutenir l’International Society of Drug Bulletins.

  • Serge Mongeau. Il passe du stéthoscope en banlieue peu favorisée de Montréal, à la plume comme éditeur et écrivain engagé, dont « La simplicité volontaire, plus que jamais » en 1998 [1], « Moi ma santé » [2] et « L’Écosophie ou la sagesse de la nature » en 1994 [3], et plusieurs autres chez Écosociété qu’il cofonde, dédiée à l’écologie sociale [ecosociete.org/livres]. Cette maison d’édition d’allégeance altermondialiste et anti-néolibéraliste, avec ses plus de 275 titres, ne craint pas l’affrontement même devant les tribunaux avec les multinationales de ce monde, qui exploitent les moins nantis. Harmonia Mundi en est le distributeur européen. Mongeau continue à promouvoir et à pratiquer la simplicité volontaire.
  • Philippe Foucras. Alors formateur généraliste en milieu défavorisé dans le Nord de la France en 2004, Philippe Foucras lance le collectif « Formindep » pour une formation indépendante en santé, devenue association d’intérêt général financée par abonnés et dons. En 2010 les pressions exercées par cette association sur la Haute Autorité de Santé (HAS) obtiennent l’abrogation de directives jugées biaisées sur le traitement du diabète de type 2, et en 2011 le retrait de recommandations sur le traitement de l’Alzheimer, jugées insatisfaisantes pour motif d’élaboration contraire à la législation et aux règles internes de gestion des conflits d’intérêts de la HAS. Après avoir œuvré comme médecin du travail, il exerce maintenant comme généraliste au sein d’un hôpital psychiatrique dans la Nièvre.
  • Jean-Claude Grange. Alias Docteurdu16, de Mantes-la-Jolie, Jean-Claude Grange anime le blog « DE LA MÉDECINE GÉNÉRALE, seulement de la médecine générale » [docteurdu16.blogspot.com]. « Les généralistes constituent le groupe professionnel le plus important en santé publique d’un point de vue économique, médical et social. La médecine générale manque pourtant de reconnaissance, elle n’est pas assez enseignée, elle ne fait pas l’objet d’assez de recherches, elle ne reçoit pas assez de ressources ».
  • Marc Zaffran. Alias Martin Winkler, de médecin en région en France particulièrement soucieux de la santé des femmes, il devient rédacteur à la revue Prescrire, romancier prolifique (dont « La Maladie de Sachs » en 1998 [4] et « Les trois médecins » en 2004 [5]), essayiste (dont « Le Patient et le médecin » [6] en 2004), vulgarisateur, traducteur, journaliste médical et animateur du Winkler's Webzine. Ses critiques de l’industrie et de ses publicités outrancières lui auraient valu un congédiement des lignes de France Inter en 2003. Cet auteur à succès que tous connaissent a délaissé le stéthoscope et habite maintenant à Montréal.
  • Nicole Audet. De Montréal, elle est l’auteure de livres éducatifs et inspirants destinés aux enfants [Collection Félix et Boubou sur nicoleaudet.com) et leurs familles, dont le livre à succès « Votre Guide Santé Info » [7]. Pédagogue et vulgarisatrice médicale, elle publie des ouvrages moult fois primés ici et ailleurs : ainsi a-t-elle reçu le prix Prescrire du meilleur livre médical et pharmaceutique pour « Épidémiologie appliquée » et plusieurs médailles aux salons du livre de Miami et de Las Vegas.
  • Claude de Bourguignon. Ce généraliste de terrain en France et retraité depuis peu, cosigne avec Patrice Queneau de l’Académie Nationale de Médecine « Sauver le médecin généraliste » [8], ouvrage qui dresse un état des lieux et n’élude aucune difficulté et formule des solutions novatrices pour une médecine exigeante et humaine, science et art de soigner chaque malade de façon personnalisée… « Homme ou femme de science et de confiance, dévoué et disponible pour chaque malade, le généraliste est le pilier et l’avenir de la médecine, un enjeu majeur pour la société et une raison d’espérer pour le malade… Le médecin généraliste qui écoute est une perle, celui examine vaut de l’or, celui qui explique est un trésor et celui qui optimise les traitements est un sage ».
  • Jean-Pierre Vallée. Installé à Colleville-Montgomery dans le Calvados, il fut le rédacteur en chef fondateur de plusieurs revues médicales dont Médecine, revue militante et indépendante de médecine générale qui se passe de présentation ici et qu’il a bonifiée au fil des ans de ses nombreuses chroniques aussi édifiantes qu’inspirantes pour les omnipraticiens. Sa retraite est regrettée mais ses successeurs à la rédaction reprennent le flambeau.
  • Jean-Marie Therrien. Il exerça en milieu rural à Windsor au Québec et en décryptant la littérature devint un cholestérolo-sceptique averti et convaincant dans son livre « Une Histoire inventée : essai sur le cholestérol » [9] consacré à la démolition de l’hypothèse lipidique et de l’usage irrationnel des statines.
  • Dominique Dupagne. De Paris, essayiste dans « La Revanche du rameur » [10], il fonde et anime le site Atoute.org spécialisé dans la santé et les forums médicaux. Les articles du site attirent jusqu’à 60 000 lecteurs par mois et les forums de 500 à 750 000, signe que l’animateur sait rejoindre les membres de la profession et ne craint pas d’aborder les sujets controversés de l’heure en France.
  • Claudina Michal-Teitlebaum. De Lyon, elle est co-auteure de « Faut-il vacciner mon enfant ? » [11]. Elle plaide activement sur de nombreux médias (dont #MartinFierro) pour une pratique à l’abri des influences intéressées et pour la rigueur dans l’évaluation des vaccins.
  • René Lavigueur. Ilfonde à Sainte-Anne-des-Monts au Québec un centre de pédiatrie sociale en région éloignée défavorisée et s’efforce de pratiquer la médecine générale de façon humaniste et lucide en évitant la surmédicalisation et en résistant à l’influence des promotions, des dogmes et des conventions, quitte à indisposer quelques collègues. Il ne se lasse pas d’écouter les patients raconter leur histoire et d’entretenir avec eux cette relation magique soignant-soigné qui s’installe quand on apprend à bien les connaître.
  • Marc Jamoulle. Ilexerce 40 ans à Gilly dans les faubourgs de Charleroi en Wallonie, rédige « L’Éthique d’un médecin de famille » [12], se fait l’ardent promoteur de la protection contre l’iatrogénie, qu’il surnomme « prévention quaternaire », et contribue généreusement à l’Association mondiale des médecins généralistes (WONCA) et à sa colossale Classification internationale des soins primaires, d’où son livre « Terminologie multilingue de médecine générale et de famille »[13] publié en 4 autres langues.
  • Jean Désy. De la ville de Québec, il visite durant quatre décennies le Grand Nord pour soigner entre autres des Autochtones. Poète, philosophe et professeur de littérature, on lui doit « L’Accoucheur en cuissardes » [14]. « Quand on voit quelqu’un dans notre cabinet, c’est une âme qu’on reçoit… je ne comprends pas comment on peut recevoir un patient sans jamais lever les yeux de son ordi… »
  • Philippe de Chazournes. Il pilote, depuis Saint-Denis à La Réunion, le mouvement Med’Océan [medocean.re] dédié à la qualité, l’évaluation et la recherche en médecine générale. Il n’hésite pas à se confronter aux autorités françaises quand elles font preuve de laxisme en matière de médicaments ou de coercition en santé publique, que ce soit au sujet de Gardasil® ou encore à la récente obligation vaccinale qu’il ne juge ni opportune, ni justifiée, et ou au maintien du secret médical, de plus en plus à la merci des lobbyistes industriels ou assurantiels. Il participe aux échanges pluri-professionnels pour améliorer la démarche qualité pour le patient grâce aux travaux entre « pairs » et en toute indépendance.
  • Christian Lehmann. De Poissy dans les Yvelines, Christian Lehmannest romancier, essayiste et blogueur. Après une vingtaine de livres et plus de 30 ans d’exercice de la médecine, il s’inquiète de l’avenir de la médecine générale que les décideurs en santé ne semblent pas comprendre. Selon lui, il faut batailler pour faire admettre que la médecine générale est quelque chose de complexe et qu’il faut avoir les moyens de la pratiquer, à l’abri de l’industrie pharmaceutique et des délires réglementaires engendrés par une bureaucratie qui s’alourdit continuellement.
  • Isabelle Leblanc. Elle a remplacé Marie-Claude Goulet à la présidence des Médecins québécois pour le régime public ou MQRP [mqrp.qc.ca] à Montréal, branche provinciale de Médecins canadiens pour le régime public (Toronto, Ontario). Au pays, le régime public est érodé et continuellement menacé par des intérêts particuliers tant commerciaux que gouvernementaux et professionnels ; tenu à bout de bras par quelques centaines de membres, ce groupe de pression qui évoque David contre Goliath est une voix médicale à contre-courant dont on ne peut se passer pour limiter les dégâts d’une privatisation insidieuse tolérée par l’establishment médical et politique.

Qu’en retenir ?
Quels que soient leurs modes d’expression, ils et elles ont quelque chose à nous dire. Cela dit, bien écrire n’est pas plus noble que bien pratiquer, et donc chapeau-bas à ceux et celles qui jouent leur rôle de soignant pour les malades, n’importe où, n’importe quand et aussi longtemps que nécessaire pour toujours répondre aux besoins les plus pressants.

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